RDC- face à la guerre à l’Est l’Eglise doit- elle sortir de sa réserve ?
Le Cardinal Ambongo : « Nous sommes une Église, pas un parti politique »
Alors que la situation sécuritaire en République démocratique du Congo continue de se détériorer, la prise de parole du cardinal Fridolin Ambongo sur la guerre dans l’Est du pays suscite le débat. Lors de la Journée mondiale de la Vie consacrée, célébrée ce samedi à la cathédrale Notre-Dame du Congo, l’archevêque de Kinshasa a tenu à clarifier la posture de l’Église catholique face au conflit opposant les FARDC aux rebelles du M23.
Interpellé sur ce qui est perçu comme un silence de l’institution ecclésiastique, le cardinal Ambongo a répondu avec fermeté : « Pourquoi l’Église ne parle pas ? Pourquoi le Cardinal ne parle pas ? Attention ! Nous ne sommes pas un parti politique, nous sommes l’Église… »
Ces propos posent une question de fond : jusqu’où l’Église doit-elle s’engager face à une crise qui menace l’intégrité du pays et la vie de millions de Congolais ?
Un rôle historique dans les crises du pays
L’Église catholique a toujours joué un rôle majeur en RDC, tant sur le plan social que politique. Elle a été un acteur clé dans la médiation des conflits, la dénonciation des violations des droits humains et le suivi des processus électoraux. Pourtant, face à l’agression rwandaise dénoncée par Kinshasa et à la tragédie humanitaire qui en découle, son positionnement semble plus mesuré.
Certes, la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) a maintes fois dénoncé l’insécurité à l’Est et appelé à une résolution pacifique du conflit. Mais pour de nombreux Congolais, cela ne suffit plus. La crise actuelle exige, selon eux, une parole plus forte et une prise de position plus tranchée.
L’Église face à un dilemme moral et politique
Le conflit en cours est à la fois une question de souveraineté nationale et une tragédie humaine. En choisissant une posture neutre, l’Église risque d’être perçue comme passive face aux souffrances des populations déplacées et aux crimes de guerre rapportés dans les territoires sous l’emprise du M23.
Mais en prenant une position trop engagée, elle pourrait aussi perdre son rôle de médiateur et son influence auprès de toutes les parties prenantes.
Cette déclaration du cardinal Ambongo ouvre donc un débat plus large : l’Église catholique en RDC doit-elle s’impliquer davantage dans la lutte contre l’agression étrangère ou maintenir sa mission spirituelle et pastorale ?
Face à une guerre qui redessine les rapports de force dans la région des Grands Lacs, la voix de l’Église reste attendue. Reste à savoir jusqu’où elle acceptera d’aller.
Francis Luende